Le climat mondial de ces dernières années impacte particulièrement un secteur d’activité : le BTP ! Beaucoup de tensions ont été créées par une succession d’événements déstabilisants (crises, confinements, conflits géopolitiques…). Les particuliers ont envie de parfaire leurs maisons, la main d’œuvre devient une denrée rare et les matériaux sont très limités… Un cumul de difficultés auquel il faut faire face et que nous explique Edith Laurent, gérante de la société SAS Laurent Daniel qui emploie 12 personnes à Rigny Saint Martin.
Selon vous, quel est le plus fort impact pour votre profession ?
Nous sommes une entreprise de charpente couverture. Pour l’heure, nous sommes vraiment tenus par la pénurie de tuiles, ainsi que par les prix qui bougent très vite. On a vécu déjà 2 augmentations successives assez élevées et nous en attendons une nouvelle dans les prochaines semaines. La tuile est un matériau qui nécessite beaucoup d’électricité lors de sa production… Les restrictions liées au conflit actuel y jouent un rôle majeur.
Pour aller plus loin, quelle répercussion a cette pénurie sur votre entreprise ?
Faire un choix de modèle ou de couleur devient difficile. Les attentes en réapprovisionnement vont jusqu’à 8 mois de délai : un record historique, je n’avais jamais vu ça ! Ce qui a un effet boule de neige. Nos échafaudages, soumis à différentes normes et contraintes dues à notre certification Qualibat et RGE, sont parfois bloqués sur les chantiers pendant plusieurs semaines. Ce qui nous ralentit par ailleurs car nous ne pouvons plus en disposer pour d’autres chantiers. En parallèle, l’instabilité des prix bouleverse rapidement nos devis qui doivent être établis sur des délais très courts. Nos clients, ce que je comprends tout à fait, aimeraient que le prix du devis soit le prix facturé mais c’est impossible…
Comment gérez-vous la fluctuation des prix ? Avez-vous mis en place de bonnes pratiques pour réaliser votre veille ?
La fluctuation des prix nous demande énormément de travail. Nous avons révisé nos conditions générales de vente, les délais de nos devis et nous devons faire un suivi régulier des prix proposés par nos fournisseurs. Nous nous sommes équipés d’un logiciel très utile qui compare tous les tarifs. En revanche, je suis heureuse de voir que la fidélité paye ! Nous avons d’excellentes relations avec nos fournisseurs avec lesquels nous travaillons de manière récurrente. Ces liens nous servent aujourd’hui. À l’heure où les quotas s’imposent, la fidélité est une clé !
Comment vous apprêtez-vous à vivre les prochains mois ?
Je pense que l’on peut même parler en années pour le domaine du BTP ! La tension au niveau des matériaux va continuer de s’amplifier et la RE2020* (qui va naître en 2023) va certainement déstabiliser la profession, voire ralentir fortement les investissements. Je pense que même si la crise s’arrête rapidement, les dommages engendrés ne nous feront jamais revenir à ce que nous connaissions il y a encore 3 ans… Néanmoins, nous nous devons d’avancer et d’avoir de nouveaux projets ! Nous sommes déjà en contact avec notre conseiller Adheo sur un prévisionnel à 3 ans pour investir dans plus de matériel. Comme je le dis toujours une entreprise qui ne bouge pas, meurt !
Avez-vous une idée à partager ?
Selon moi il est très important de faire preuve de compréhension et d’empathie dans ce climat sous tensions. Prenez du temps pour vivre des moments de convivialité en entreprise, avec vos partenaires et surtout en famille. Il est capital de garder en tête que tout n’est pas seulement professionnel. Ce ressourcer est essentiel !
* Introduites par la Loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015, la Stratégie nationale bas–carbone (SNBC) et la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) fixent des orientations pour les filières afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050.